❤ C’est un coup de coeur un peu particulier que je vous présente aujourd’hui… Souvenez-vous, lors de la session 2019 du baccalauréat, les élèves de première ES et S ont planché sur la poésie. Suite au corpus du texte où plusieurs poèmes étaient présentés (dont La vie profonde d’Anna de Noailles, et un poème d’Andrée Chédid), les candidats ont ensuite eu le choix entre le commentaire, la dissertation et l’invention. Le sujet demandait de commenter le poème d’Andrée Chédid. La dissertation s’appuyait elle sur le dernier vers d’Anna de Noailles “Avoir l’âme qui rêve, au bord du monde assise…” et devait répondre à la question suivante : « pensez-vous que ce vers puisse définir l’attitude du poète face au monde ? ». Les élèves ont été déstabilisés par ces poétesses inconnues d’eux et ont d’ailleurs cru qu’Andrée Chédid était un homme. Or, depuis que je possède un recueil de poésies du XXème siècle (Gallimard), La vie profonde d’Anna de Noailles est mon poème préféré entre tous. Mais je ne connaissais rien, jusqu’à la lecture de ce recueil de nouvelles que je vous présente aujourd’hui (formidablement documenté en préface et postface), de la femme qu’était en réalité Anna de Noailles. Et qu’elle n’a pas été ma surprise de constater qu’elle a côtoyé les plus grands, qu’elle a été une poétesse publiquement reconnue de son vivant, alors qu’elle sombre aujourd’hui dans l’oubli. Cette femme, pourtant, à la vie à la fois hautement romanesque, ambitieuse et délicate, féministe, mériterait bien plus d’attention. Née en 1876, Anna épouse à l’âge de 19 ans le comte Mathieu de Noailles dont elle aura un fils. Mais, Anna de Noailles fut surtout une muse et une grande amoureuse. Au début du XXème siècle, elle attire chez elle l’élite intellectuelle, littéraire et artistique de l’époque (Edmond Rostand, Paul Claudel, Colette, André Gide, Maurice Barrès, Robert de Montesquiou, Paul Valéry, Jean Cocteau, Pierre loti, etc…) Elle crée avec d’autres femmes, en 1904, le prix « Vie Heureuse », qui deviendra en 1922 le prix Fémina. Elle fut la première femme commandeur de la Légion d’honneur. En 1920, son premier recueil de poèmes (Le Cœur innombrable) est couronné par l’Académie française. En 1921, elle en reçoit le Grand prix de littérature. Plus tard, l’Académie française créera d’ailleurs un prix en son honneur. On ne peut donc pas dire qu’Anna de Noailles soit véritablement une inconnue. Mais alors pourquoi n’est-elle pas étudiée ? Est-ce parce que sa poésie traite principalement de nature, d’amour et d’éphémère ? Anna de Noailles était pourtant une femme résolument moderne. Et c’est ce qui m’a marqué dans ce recueil de nouvelles, qu’elle a publié à 47 ans, et dont j’ai eu envie de retenir de nombreux passages, passionnés, grandioses, et peut-être un peu grandiloquents, mais surtout plein de lucidité sur l’amour. Voici en effet quatorze variations sur les relations amoureuses (jalousies, tromperies, intérêts et indifférences), via lettres « jamais envoyées » et historiettes « entendues de sources sûres », qui sont autant de déclarations à l’homme qui lira peut-être un jour ce livre… Je vous préviens, c’est un peu désuet, sentimental, poétique, certains diront sans doute affreusement classique, mais moi je me suis délicieusement régalée.
« Le secret que je te promets et qui trahit les femmes, le voici, mon amour ; s’il te plaît de t’assurer de leur passion, de leur attachement, retire-leur un instant ton coeur, tourmente-les, rends-les jalouses, infuse en elle le doute, fais-les souffrir, fût-ce un peu, fût-ce à peine, et ces fronts contents et fiers ploieront sans force sous le joug affreux de la confiance perdue, et des pleurs calmes et stupéfaits descendront sur ces beaux visages, et tu ne verras plus devant toi que l’Eve lamentable qui est née humblement du corps généreux d’Adam. »
Editions Buchet Chastel – octobre 2009
Voilà que tu as bien titillé ma curiosité… je vais de ce pas faire plus ample connaissance avec la poésie d’Anna de Noailles (inculte que je suis !)
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Oh mais non ! Mais quelle injustice qu’elle soit si peu connue… En plus je suis sûre que sa vie pourrait faire un passionnant roman, ou même film !
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« La vie profonde » est effectivement un très beau poème – merci pour cette découverte. Et oui sa vie est riche (et son talent grand) et c’est absolument fou qu’elle soit si peu connue, reconnue aujourd’hui.
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N’est-ce pas ?
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C’est agréable aussi de revenir à du plus classique.
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Oui j’ai trouvé que ça me dépaysait complètement… 😉
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C’est pourquoi nous sommes un certain nombre (hommes et femmes) à nous attacher à ce combat, afin de lutter contre l’invisibilisation des œuvres de femmes. Et cela commence peu à peu à porter ses fruits.
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Tant mieux si j’ai ajouté avec ce post ma petite pierre à l’édifice.
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Oui, c’est super. Une très bonne initiative parce que forcément tu relaies, tu as de l’influence.
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Merci 😉
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Elle est oubliée tout simplement parce que c’est une femme et comme tant d’autres, on l’a mise sous le tapis. J’aimais déjà sa poésie à l’école primaire et j’avais compris son importance en lisant un livre sur Edmond Rostand, il y a longtemps. Les femmes de talent n’ont jamais manqué, on les a « seulement » invisibilisées.
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C’est tout à fait ça Aifelle !! Elle a joué un grand rôle dans l’histoire littéraire de l’époque et c’est fou, personne ne l’évoque.
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Une poétesse à découvrir!
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Oui !!
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très beau commentaire!
cela me donne envie de me replonger dans l’œuvre d’Anna de Noailles que je n’ai pas relue même en travers depuis le bahut…
Andrée Chedid a écrit de beaux textes, son roman « Le sixième jour » m’a beaucoup touchée…
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Oui moi aussi j’ai lu autrefois Andrée Chedid (le sixième jour effectivement) et je n’avais pas lu autre chose que la poésie d’Anna de Noailles.
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j’avais appris plusieurs poèmes pendant les années bahut (peut-être même fin de primaire d’ailleurs c’est loin 🙂
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J’avais l’impression qu’elle n’était pas étudiée en classe, tant mieux alors !
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je parlais d’Anna de Noailles, pour Andrée Chedid, je ne suis pas sûre que ses textes soient étudiés an milieu scolaire, c’était une découverte personnelle 🙂
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Elle n’est pas étudiée parce que la littérature féminine a encore du mal à passer les portes des collèges et des lycées, c’est déjà une grande avancée qu’Andrée Chédid et elle aient été intégrées aux sujets du bac mais tu as pu voir les réactions ! C’est sans doute aux profs à aller chercher un peu ailleurs que dans les textes écrits par des hommes. Je la connaissais de nom mais sans plus cela dit et pourtant la littérature féminine, tu le sais, m’intéresse particulièrement.
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